L’entrée en vigueur de la Charte arabe des droits de l’homme de 2004

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Le 15 janvier 2004 la Charte arabe des droits de l'homme de 2004[1] est entrée en vigueur, d'après son article 49 exigeant la ratification de 7 Etats arabes membres de la Ligue des Etats arabes, marquant ainsi une nouvelle étape dans le domaine de la protection des droits de l'homme dans le Monde arabe[2].

Le Sommet de la Ligue des Etats arabes, tenu à Tunis en mai 2004, a adopté cette nouvelle version de la Charte arabe[3]. Elle contient un préambule et 53 articles.

Le préambule de cette Charte arabe parle, d'un côté, des principes définis par les religions divines concernant la fraternité et l'égalité, et proclame, d'un autre côté, l'attachement des Etats membres de la Ligue des Etats arabes, à la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948, aux Pactes internationaux relatifs aux droits de l'homme de 1966, et à la Déclaration du Caire sur les droits de l'homme en Islam de 1990. Mais le fait d'associer ces trois derniers textes, surtout la Déclaration du Caire aux Pactes internationaux, pose la question de la compatibilité ou non de la Déclaration du Caire avec les normes internationales protégeant les droits de l'homme.

En plus de l'affirmation, dans l'article 2 de cette Charte arabe, du droit de tous les peuples « de disposer d'eux-mêmes et d'être maîtres de leurs richesses et leurs ressources », et le droit « de choisir librement leur système politique et de poursuivre librement leur développement économique, social et culturel ». Nous pouvons diviser les droits et les libertés dans celle-ci en quatre catégories :

  1. Les droits inhérents à la personne : le droit à la vie (articles 5, 6, 7), interdiction de la torture physique ou mentale ou à un traitement cruel, inhumain, humiliant ou dégradant (articles 8, 9, 18, 20), l'interdiction de l'esclavage (l'article 10), le droit à la sécurité (articles 14, 18), et le droit de jouir du meilleur état de santé physique et mentale (article 39).

  2. Les droits traitant de bon fonctionnement de la justice. Ils affirment l'égalité devant la justice (article 12), le droit à un procès équitable (les articles 13, 16, 17, 19) et la légalité des peines (l'article 15).
  3. En ce qui concerne les droits civils et politiques, la Charte arabe reconnaît la liberté de circulation (articles 24, 26, 27), le droit au respect de la vie privée et familiale (article 21), les droits des minorités (article 25), le droit à l'asile politique (article 28), le droit à une nationalité (article 29), le droit à la liberté de pensée, de croyance et de religion (article 30), le droit à la propriété privée (article 31), le droit à l'information, à la liberté d'opinion et d'expression, et le droit de recherche (article 32), ainsi que la protection de la famille et le droit au mariage (article 33).
  4. Les droits économiques, sociaux et culturels sont reconnus par la Charte arabe. Le droit au travail (article 34), le droit de constituer un syndicat (l'article 35), le droit à la sécurité sociale (article 36), le droit au développement (article 37), le droit à une vie suffisante (article 38), les droits des handicapés (article 40), le droit à l'éducation et la nécessité de combattre l'analphabétisme (l'article 41), ainsi que le droit de participer à la vie culturelle (article 42).

Comme mécanisme de contrôle, la Charte arabe crée un comité arabe des droits de l'homme composé de sept experts (les articles 45-47), ainsi que l'obligation, pour les Etats parties à la Charte, de présenter, un an après l'entrée en vigueur de la Charte, un premier rapport sur la situation des droits de l'homme dans leurs pays, puis des rapports périodiques (tous les trois ans), à quoi s'ajoutent des rapports supplémentaires (article 48).

La Charte arabe s'achève sur des dispositions finales, présentant notamment les modalités de son entrée en vigueur et affirmant la possibilité d'adjonction de protocoles additionnels (articles 49-53).

Malgré les progrès réalisés par l'adoption de cette Charte arabe des droits de l'homme en 2004 en affirmant l'égalité entre l'homme et la femme en dignité et en droits, le droit au développement, ou les droits des handicapés ; le mécanisme de cette Charte ne répond pas aux aspirations de beaucoup des spécialistes des droits de l'homme. Ainsi, il n'y aucune possibilité de présenter des communications étatiques et/ou individuelle, dans le cas de la violation de ces dispositions, d'une part.

D'autre part, il manque dans celle-ci un organe judiciaire des droits de l'homme, nous voulons dire une Cour arabe des droits de l'homme.

Nous pensons que le meilleur moyen pour améliorer les dispositions de cette Charte arabe, et surtout son mécanisme sera l'adoption des protocoles additionnels. Une solution prévue par son article 52, et c'est un moyen déjà utilisé par les différents systèmes régionaux de protection des droits de l'homme comme le système africain et l'exemple de protocole additionnel à la Charte africain des droits de l'homme et des peuples créant une Cour africaine des droits de l'homme est très significatif dans ce domaine en sachant que plusieurs Etats arabes sont des Etats africains membres de l'Union africaine.

Mohammed Amin AL-MIDANI est Président du Centre Arabe pour l'Education au Droit International Humanitaire et aux Droits Humains, Lyon - Strasbourg., France.

Notes

[1] Voir le texte de cette Charte arabe des droits de l'homme 2004 ici.

[2] Les Etats arabes qui ont ratifié cette Charte arabe sont: Algérie, Bahreïn, Emirats Arabes Unis, Jordanie, Libye, Tunisie, Yémen.

[3] Voir concernant l'ancienne version de la Charte arabe des droits de l'homme 1994 : www.aidh.org.

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