Projet de charte arabe des droits de l'homme - 15 janvier 2004

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Procédant de la foi de la Nation arabe dans la dignité de l'homme que Dieu a honoré depuis la création du monde et dans le fait que la patrie arabe est le berceau des religions et des civilisations dont les nobles valeurs ont consacré le droit de l'homme à une vie digne fondée sur la liberté, la justice et l'égalité,

Afin de concrétiser les principes éternels de fraternité, d'égalité et de tolérance entre les êtres humains consacrés par l'Islam et les autres religions révélées,

Fiers des valeurs et des principes humanitaires que la Nation arabe a établis au cours de sa longue histoire, lesquels ont contribué, dans une large mesure, à la diffusion de la science entre l'Orient et l'Occident, faisant de la région le point de mire du monde entier et la destination privilégiée des personnes en quête de savoir et de sagesse,

Ayant foi dans l'unité de la patrie arabe, qui lutte pour sa liberté et défend le droit des nations à disposer d'elles-mêmes, à préserver leurs richesses et à se développer; ayant foi également dans la primauté du droit et dans sa contribution à la protection des droits de l'homme envisagés dans leur universalité et leur complémentarité et convaincue que la jouissance par l'être humain de la liberté, de la justice et de l'égalité des chances est l'aune à laquelle se mesure la valeur de toute société,

Rejetant toutes les formes de racisme et le sionisme qui constituent une violation des droits de l'homme et une menace pour la paix et la sécurité internationales, consciente du lien étroit existant entre les droits de l'homme et la paix et la sécurité internationales, réaffirmant les principes de la Charte des Nations Unies, de la Déclaration universelle des droits de l'homme et les dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et tenant compte de la Déclaration du Caire sur les droits de l'homme en Islam,

Les États parties au Pacte conviennent de ce qui suit:

Article premier

La présente Charte vise, dans le cadre de l'identité nationale des États arabes et du sentiment d'appartenance à une civilisation commune, à réaliser les objectifs suivants:
  1. Placer les droits de l'homme au cœur des préoccupations nationales dans les États arabes de façon à en faire de grands idéaux qui orientent la volonté de l'individu dans ces États et lui permettent d'améliorer sa réalité en accord avec les nobles valeurs humaines;
  2. Inculquer à l'être humain dans les États arabes la fierté de son identité, la fidélité à sa patrie et l'attachement à sa terre, à son histoire et à ses intérêts communs et faire en sorte qu'il s'imprègne d'une culture de fraternité humaine, de tolérance et d'ouverture sur autrui, conformément aux principes et aux valeurs universels et à ceux qui sont proclamés dans les instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme;
  3. Préparer les nouvelles générations dans les États arabes à une vie libre et responsable dans une société civile solidaire fondée sur l'équilibre entre la conscience des droits et le respect des obligations et régie par les valeurs d'égalité, de tolérance et de modération;
  4. Enraciner le principe selon lequel tous les droits de l'homme sont universels, indivisibles, interdépendants et indissociables.

Article 2

  1. Tous les peuples ont le droit de disposer d'eux-mêmes et d'être maîtres de leurs richesses et leurs ressources, et le droit de choisir librement leur système politique et de poursuivre librement leur développement économique, social et culturel;
  2. Tous les peuples ont le droit de vivre à l'ombre de la souveraineté nationale et de l'unité territoriale;
  3. Toutes les formes de racisme, le sionisme, l'occupation et la domination étrangères constituent une entrave à la dignité de l'homme et un obstacle majeur à l'exercice des droits fondamentaux des peuples; il est impératif decondamner leur pratique sous toutes ses formes et de veiller à leur élimination;
  4. Tous les peuples ont le droit de résister à l'occupation étrangère.

Article 3

  1. Chaque État partie à la présente Charte s'engage à garantir à tout individu relevant de sa juridiction le droit de jouir des droits et des libertés énoncés dans la présente Charte sans distinction aucune fondée sur la race, la couleur, le sexe, la langue, la croyance religieuse, l'opinion, la pensée, l'origine nationale ou sociale, la fortune, la naissance ou le handicap physique ou mental;
  2. Les États parties à la présente Charte prennent les mesures requises pour garantir l'égalité effective dans l'exercice de tous les droits et de toutes les libertés consacrés par la présente Charte, de façon à assurer une protection contre toutes les formes de discrimination fondées sur l'un quelconque des motifs mentionnés au paragraphe précédent;
  3. L'homme et la femme sont égaux sur le plan de la dignité humaine, des droits et des devoirs dans le cadre de la discrimination positive instituée au profit de la femme par la charia islamique et les autres lois divines et par les législations et les instruments internationaux. En conséquence, chaque État partie à la présente Charte s'engage à prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir la parité des chances et l'égalité effective entre l'homme et la femme dans l'exercice de tous les droits énoncés dans la présente Charte.

Article 4

  1. En cas de situation d'urgence exceptionnelle mettant en danger l'existence de la nation et proclamée par un acte officiel, les États parties à la présente Charte peuvent prendre, dans la stricte mesure où l'exige la situation, des dispositions qui dérogent aux engagements qu'ils ont contractés en vertu de la présente Charte, à condition que ces dispositions n'aillent pas à l'encontre des autres obligations qui leur incombent en vertu du droit international et n'entraînent aucunediscrimination fondée sur le seul motif de la race, de la couleur, du sexe, de la langue, de la religion ou de l'origine sociale;
  2. Aucune dérogation aux dispositions ci-après n'est autorisée, en cas de situation d'urgence exceptionnelle: article 5, article 8, article 9, article 10, article 13, article 14, article 15, article 18, article 19, article 30, article 20, article 22, article 27, article 28 et article 29. En outre, les garanties judiciaires nécessaires pour la protection de ces droits visés ne peuvent être suspendues.
  3. Tout État partie à la présente Charte qui exerce le droit de dérogation informe immédiatement les autres États parties, par l'intermédiaire du Secrétaire général de la Ligue des États arabes, des dispositions auxquelles il déroge et des motifs de la dérogation. Il les informe également par le même truchement de la fin de la dérogation à la date à laquelle celle-ci intervient.

Article 5

  1. Le droit à la vie est un droit inhérent à toute personne humaine;
  2. La loi protège ce droit et nul ne sera privé arbitrairement de sa vie.

Article 6

La peine de mort ne peut être prononcée que pour les crimes les plus graves conformément aux lois en vigueur au moment où le crime est commis et en vertu d'un jugement définitif rendu par un tribunal compétent. Toute personne condamnée à la peine de mort a le droit de solliciter la grâce ou l'allégement de sa peine.

Article 7

  1. La peine de mort ne peut être prononcée contre des personnes âgées de moins de 18 ans sauf disposition contraire de la législation en vigueur au moment de l'infraction;
  2. La peine de mort ne peut être exécutée sur la personne d'une femme enceinte tant qu'elle n'a pas accouché ou d'une mère qui allaite que deux années après l'accouchement, dans tous les cas l'intérêt du nourrisson prime.

Article 8

  1. Nul ne peut être soumis à des tortures physiques ou mentales ou à untraitement cruel, inhumain, humiliant ou dégradant.
  2. Chaque État partie protège tout individu relevant de sa juridiction de ce type de pratiques et prend des mesures efficaces pour les prévenir. Ces actes ou la participation à ces actes sont considérés comme des crimes imprescriptibles punis par la loi. Chaque État partie garantit dans son système juridique réparation à la victime d'un acte de torture et le droit à une réhabilitation et à une indemnisation.

Article 9

Il est interdit de soumettre quiconque à des expériences médicales ou scientifiques ou d'utiliser ses organes sans son libre consentement et sa pleine connaissance des conséquences pouvant résulter de cela, étant entendu que les règles éthiques, humanitaires et professionnelles doivent être observées et que les procédures médicales de nature à garantir la sécurité personnelle de l'intéressé conformément aux lois pertinentes en vigueur dans chaque État partie doivent être respectées. Le commerce des organes humains est interdit quelles que soient les circonstances.

Article 10

  1. L'esclavage et la traite des êtres humains sont interdits sous toutes leurs formes et punis par la loi. Nul ne peut être tenu en esclavage ou en servitude quelles que soient les circonstances;
  2. Le travail forcé, la traite des êtres humains à des fins de prostitution ou d'exploitation sexuelle, l'exploitation de la prostitution d'autrui et toutes les autres formes d'exploitation ainsi que l'exploitation des enfants dans les conflits armés sont interdits.

Article 11

Toutes les personnes sont égales devant la loi et ont le droit de jouir de sa protection sans distinction d'aucune sorte.

Article 12

Toutes les personnes sont égales devant la justice. Les États parties garantissent l'indépendance de la justice et la protection des juges contre toute ingérence, pression ou menace. Ils garantissent également à tous les individus relevant de leur compétence l'accès auxjuridictions de tous les degrés.

Article 13

  1. Chacun a droit à un procès équitable dans lequel sont assurées des garanties suffisantes et conduit par un tribunal compétent indépendant et impartial établi préalablement par a loi qui décidera du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle ou se prononcera sur ses droits et ses obligations. Chaque État partie garantit à ceux qui n'ont pas les ressources nécessaires une aide juridictionnelle pour leur permettre de défendre leurs droits;
  2. Le procès est public sauf dans des cas exceptionnels lorsque l'exige l'intérêt de la justice dans une société respectueuse des libertés et droits de l'homme.

Article 14

  1. Tout individu a droit à la liberté et à la sécurité de sa personne. Nul ne peut faire l'objet d'une arrestation, d'une perquisition ou d'une détention arbitraire et sans mandat légal;
  2. Nul ne peut être privé de sa liberté, si ce n'est pour les motifs et dans les cas prévus préalablement par la loi et conformément à la procédure qui y est fixée;
  3. Tout individu arrêté sera informé, au moment de son arrestation, dans une langue qu'il comprend, des raisons de cette arrestation, recevra immédiatement notification de toute accusation portée contre lui et a le droit de prendre contact avec ses proches;
  4. Toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit de demander d'être soumis à un examen médical et doit être informée de ce droit;
  5. La personne arrêtée ou détenue du chef d'une accusation pénale est présentée dans les plus brefs délais à un juge ou un fonctionnaire habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires, et devrait être jugée dans un délai raisonnable ou libérée. Sa libération peut être subordonnée à des garanties assurant sa comparution à l'audience. La détention provisoire ne doit en aucun cas être la règle;
  6. Quiconque est privé de sa liberté par arrestation ou détention a le droitd'introduire un recours devant un tribunal compétent afin que celui-ci statue sans délai sur la légalité de cette arrestation ou détention et ordonne sa libération si l'arrestation ou la détention est illégale;
  7. Toute personne victime d'une arrestation ou d'une détention arbitraire ou illégale a droit à réparation.

Article 15

Il ne peut y avoir d'infraction ni de peine qu'en vertu d'un texte de loi adopté préalablement; la loi la plus favorable à l'accusé est appliquée dans tous les cas.

Article 16

Toute personne accusée d'une infraction est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été établie par un jugement définitif conformément à la loi et a droit au cours de l'instruction et durant le procès au moins aux garanties suivantes:
  1. Droit d'être informée immédiatement de façon détaillée et dans une langue qu'elle comprend de la nature des accusations portées contre elle;
  2. Droit de disposer d'un temps et de facilités suffisants pour préparer sa défense et de prendre contact avec ses proches;
  3. Droit d'être jugée en sa présence devant son juge naturel et de se défendre elle-même ou avec l'assistance d'un avocat de son choix avec lequel elle peut communiquer en toute liberté et confidentialité;
  4. Droit de bénéficier gratuitement de l'assistance d'un avocat pour la défendre si elle ne peut pas le faire elle-même ou si l'intérêt de la justice l'exige et droit de se faire assister gratuitement d'un interprète si elle ne comprend pas ou ne parle pas la langue employée à l'audience;
  5. Droit d'interroger elle-même ou de faire interroger par son défenseur les témoins à charge et d'obtenir la comparution de témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge;
  6. Droit de ne pas être forcée de témoigner contre elle-même ou de s'avouer coupable;
  7. Droit, si elle est déclarée coupable d'une infraction, de faire appel conformément à la loi devant une instance judiciaire supérieure;
  8. Droit à ce que la sécurité de sa personne et sa vie privée soient respectées en toutes circonstances.

Article 17

Chaque État partie garantit en particulier à tout enfant à risque ou délinquant accusé d'une infraction le droit à un régime judiciaire spécial pour mineurs tout au long des poursuites, du procès et de l'application du jugement et à un traitement spécial qui soit compatible avec son âge et qui protège sa dignité, facilite sa réadaptation et sa réinsertion et lui permette de jouer un rôle constructif dans la société.

Article 18

Aucune personne dont l'incapacité de s'acquitter d'une dette résultant d'une obligation contractuelle a été établie ne sera emprisonnée.

Article 19

  1. Nul ne peut être jugé deux fois pour une même infraction. Il appartient à toute personne faisant l'objet d'une telle procédure d'en contester la légalité et de demander sa libération;
  2. Tout prévenu dont l'innocence a été établie par un jugement définitif a le droit d'être indemnisé du préjudice qu'il a subi.

Article 20

  1. Toute personne privée de sa liberté est traitée avec humanité et avec le respect de la dignité inhérente à la personne humaine;
  2. Les prévenus sont séparés des condamnés et sont traités de manière compatible avec leur condition de personne non condamnée;
  3. Le régime pénitentiaire a pour but l'amendement et la réinsertion sociale des prisonniers.

Article 21

  1. Nul ne fera l'objet d'immixtion arbitraire ou illégale dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d'atteinte à son honneur ou à sa réputation;
  2. Toute personne a droit à la protection de la loi contre une telle immixtion ou atteinte.

Article 22

Toute personne a droit à la reconnaissance de sa personnalité juridique.

Article 23

Chaque État partie à la présente Charte garantit un moyen de recours utile à toutepersonne dont les droits ou les libertés reconnus dans la présente Charte ont été violés même si la violation a été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles.

Article 24

  1. Tout citoyen a le droit de pratiquer librement une activité politique;
  2. Tout citoyen a le droit de participer à la direction des affaires publiques, directement ou par l'intermédiaire de représentants librement choisis;
  3. Tout citoyen a le droit de se porter candidat ou de choisir ses représentants dans des élections libres et régulières et dans des conditions d'égalité entre tous les citoyens assurant la libre expression de sa volonté;
  4. Tout citoyen a le droit de bénéficier de la possibilité d'accéder dans des conditions d'égalité avec les autres aux fonctions publiques de son pays dans le respect de la parité des chances;
  5. Toute personne a le droit de constituer librement des associations avec d'autres et d'y adhérer;
  6. Tout citoyen a le droit à la liberté de réunion et à la liberté de rassemblement pacifique;
  7. L'exercice de ces droits ne peut faire l'objet que des seules restrictions imposées conformément à la loi et qui sont nécessaires dans une société respectueuse des libertés et des droits de l'homme pour protéger la sécurité nationale, l'ordre public, la sûreté publique, la santé publique ou la moralité publique ou pour sauvegarder les droits et les libertés d'autrui.

Article 25

Les personnes appartenant à des minorités ne peuvent être privées du droit de jouir de leur culture, d'utiliser leur langue et de pratiquer les préceptes de leur religion; la loi réglemente l'exercice de ces droits.

Article 26

  1. Toute personne qui se trouve légalement sur le territoire d'un État partie jouit de la liberté de circuler et choisit librement son lieu de résidence, où que ce soit sur ce territoire dans le respect des lois en vigueur;
  2. Aucun État partie n'expulsera unepersonne qui ne détient pas sa nationalité mais qui se trouve légalement sur son territoire, qu'en exécution d'une décision prise conformément à la loi et après lui avoir donné, sauf si des considérations de sécurité nationale s'y opposent, la possibilité d'introduire un recours devant l'autorité compétente; l'expulsion collective est interdite dans tous les cas.

Article 27

  1. Nul ne peut être arbitrairement ou illégalement empêché de quitter un pays quel qu'il soit, y compris son propre pays, interdit de séjour dans une région donnée, ou obligé à séjourner dans ledit pays;
  2. Nul ne peut être exilé de son pays ou privé du droit d'y retourner.

Article 28

Chacun a le droit de demander l'asile politique à un autre pays pour échapper à la persécution; ce droit ne peut être exercé par une personne qui fait l'objet de poursuites pour une infraction de droit commun. Il est interdit d'extrader des réfugiés politiques.

Article 29

  1. Toute personne a droit à une nationalité et nul ne peut être déchu arbitrairement ou illégalement de sa nationalité;
  2. Les États partie prendront, conformément à leur législation relative à la nationalité, les mesures qu'ils jugeront appropriées pour permettre à l'enfant d'acquérir la nationalité de sa mère en tenant compte dans tous les cas de l'intérêt de l'enfant;
  3. Nul ne se verra dénier le droit d'acquérir une autre nationalité compte dûment tenu des procédures juridiques en vigueur dans son pays.

Article 30

  1. Toute personne a droit à la liberté de pensée, de croyance et de religion, qui ne peut faire l'objet d'aucune restriction non prévue par la loi;
  2. La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ou de pratiquer individuellement ou collectivement les rites de sa religion ne peut faire l'objet que des seules restrictions prévues par la loi et qui sont nécessaires dans une société tolérante, respectueuse deslibertés et des droits de l'homme pour la protection de la sûreté publique, de l'ordre public, de la santé publique ou de la moralité publique ou des libertés et droits fondamentaux d'autrui;
  3. Les parents ou les tuteurs assurent librement l'éducation religieuse et morale de leurs enfants.

Article 31

Le droit à la propriété privée est garanti à chacun et il est interdit dans tous les cas de confisquer arbitrairement ou illégalement tout ou partie des biens d'une personne.

Article 32

  1. La présente Charte garantit le droit à l'information et la liberté d'opinion et d'expression et le droit de rechercher, de recevoir et de répandre des informations par tout moyen, sans considération de frontières géographiques;
  2. Ces droits et libertés sont exercés dans le cadre des principes fondamentaux de la société et sont soumis aux seules restrictions nécessaires au respect des droits et de la réputation d'autrui et à la sauvegarde de la sécurité nationale, de l'ordre public, de la santé publique ou de la moralité publique.

Article 33

  1. La famille est la cellule naturelle et fondamentale de la société; elle est fondée sur le mariage entre l'homme et la femme; le droit de se marier et de fonder une famille selon les règles et les conditions régissant le mariage, est reconnu à l'homme et à la femme dès qu'ils sont en âge de contracter un mariage. Il ne peut y avoir de mariage sans le plein et libre consentement des deux parties. La législation en vigueur réglemente les droits et les devoirs de l'homme et de la femme au regard du mariage, durant le mariage et lors de sa dissolution;
  2. L'État et la société garantissent la protection de la famille, le renforcement de ses liens, la protection de ses membres, l'interdiction de toutes les formes de violence ou de mauvais traitements dans les relations entre ses membres, en particulier à l'égard de la femme et de l'enfant. Ils garantissent également à la mère, àl'enfant, à la personne âgée et aux personnes ayant des besoins particuliers la protection et l'assistance nécessaires et assurent aux adolescents et aux jeunes les meilleures chances de développement physique et mental;
  3. Les États partie prennent toutes les dispositions législatives, administratives et judiciaires requises pour assurer la protection, la survie et le bien-être de l'enfant dans un climat de liberté et de dignité et pour faire en sorte que son intérêt supérieur soit, en toutes circonstances, le critère à la base de toutes les mesures le concernant qu'il s'agisse d'un enfant à risque ou d'un enfant délinquant;
  4. Les États partie prennent toutes les mesures nécessaires pour garantir notamment aux jeunes le droit d'exercer une activité sportive.

Article 34

  1. Le droit au travail est un droit naturel de chaque citoyen. L'État s'efforce d'assurer dans la mesure du possible un emploi au plus grand nombre de demandeurs tout en garantissant la production, la liberté du travail et l'égalité des chances sans distinction aucune fondée sur la race, la couleur, le sexe, la religion, la langue, l'opinion politique, l'appartenance à un syndicat, l'origine nationale, l'origine sociale, un handicap ou toute autre situation;
  2. Chaque travailleur a le droit de jouir de conditions de travail justes et favorables qui assurent un salaire équitable lui permettant de subvenir à ses besoins essentiels et à ceux de sa famille et fixent les heures de travail et de repos, les congés payés et les règles pour préserver l'hygiène et la sécurité du travail et la protection des femmes, des enfants et des personnes handicapées dans le cadre du travail;
  3. Les États parties reconnaissent le droit de l'enfant d'être protégé contre l'exploitation économique et de n'être astreint à aucun travail potentiellement dangereux ou susceptible d'entraver son éducation ou de nuire à sa santé ou à son développement physique, mental, spirituel, moral ou social. À cette fin, et compte tenu des dispositions des autres instruments internationaux pertinents, les États parties, en particulier:
    1. Fixent un âge minimum d'admission à l'emploi;
    2. Prévoient une réglementation appropriée des horaires de travail et des conditions d'emploi;
    3. Prévoient des peines ou d'autres sanctions appropriées pour assurer l'application effective du présent article.
  4. Il est interdit de faire une distinction entre l'homme et la femme dans l'exercice du droit de bénéficier de manière effective d'une formation, d'un emploi, de la protection du travail et d'un salaire égal pour un travail de valeur et de qualité égales;
  5. Chaque État partie assure aux travailleurs qui immigrent sur son territoire la protection requise conformément à la législation en vigueur.

Article 35

  1. Chaque individu a le droit de constituer des syndicats ou d'adhérer à des syndicats et de pratiquer librement une activité syndicale pour défendre ses intérêts;
  2. L'exercice de ses droits et libertés ne peut faire l'objet que des seules restrictions prévues par les lois en vigueur et qui sont nécessaires pour préserver la sécurité nationale, la sûreté publique, l'ordre public ou pour protéger la santé publique, la moralité publique ou les droits et les libertés d'autrui;
  3. Chaque État partie garantit le droit de grève dans les limites fixées par la législation en vigueur.

Article 36

Les États parties garantissent le droit de chaque citoyen à la sécurité sociale, y compris l'assurance sociale.

Article 37

Le droit au développement est un des droits fondamentaux de l'homme et tous les États parties sont tenus d'établir les politiques de développement et de prendre les mesures requises pour assurer ce droit. Il leur incombe d'œuvrer pour concrétiser les valeurs de solidarité et de coopération entre eux et au niveau international afin d'éliminer la pauvreté et de réaliser le développement économique, social, culturel et politique. En vertu de ce droit, chaque citoyen a le droit de participer à la réalisation du développement, d'y contribuer et de bénéficier de ses bienfaits et de ses fruits.

Article 38

Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant, pour elle et sa famille, qui leur assure le bien-être et une vie décente, y compris la nourriture, les vêtements, le logement et les services, et a droit à un environnement sain. Les États parties prennent les mesures requises en fonction de leurs ressources pour assurer ce droit.

Article 39

  1. Les États parties reconnaissent le droit qu'a tout membre de la société de jouir du meilleur état de santé physique et mentale qui puisse être atteint et le droit du citoyen de bénéficier gratuitement des services de santé de base et d'accéder aux centres de soins médicaux sans discrimination aucune;
  2. Les mesures que les États parties prendront comprennent les suivantes:
    1. Développement des soins de santé de base et garantie de la gratuité des services des centres qui fournissent ces soins et de la facilité d'accès à ces centres où qu'ils soient et quelle que soit la situation économique;
    2. Fourniture d'efforts pour combattre les maladies par des moyens préventifs et curatifs de façon à réduire la mortalité;
    3. Action de sensibilisation et d'éducation sanitaires;
    4. Lutte contre les pratiques traditionnelles préjudiciables à la santé de la personne;
    5. Garantie à chacun de la nourriture de base et de l'eau potable;
    6. Lutte contre les facteurs de pollution de l'environnement et fourniture de moyens d'assainissement;
    7. Lutte contre le tabagisme, la drogue et les substances psychotropes;

Article 40

  1. Les États parties s'engagent à assurer aux personnes mentalement ou physiquement handicapées une vie décente qui garantisse leur dignité, ainsi qu'à renforcer leur autonomie et à faciliter leur participation effective dans la société;
  2. Les États parties fournissent gratuitement des services sociaux à toutes les personnes handicapées, apportent à celles d'entre elles qui en ont besoin un soutien matériel, directement ou par le biais de leur famille ou de la famille qui s'occupe d'eux, et font tout ce qui est nécessaire pour éviter leur placement en institution. Dans tous les cas, ils prennent en compte l'intérêt supérieur de la personne handicapée;
  3. Les États parties prennent toutes les dispositions nécessaires pour lutter par tous les moyens possibles contre les handicaps, notamment par le biais de programmes de santé préventive et d'efforts de sensibilisation et d'éducation;
  4. Les États parties fournissent tous les services d'enseignement appropriés aux personnes handicapées en tenant compte de l'importance de leur intégration dans le système d'enseignement, ainsi que de l'importance de la formation professionnelle, de la préparation à exercer une activité professionnelle et de la fourniture d'un emploi approprié dans le secteur public ou privé;
  5. Les États parties fournissent tous les services de santé appropriés aux personnes handicapées, y compris des services de réadaptation pour leur intégration dans la société;
  6. Les États parties assurent aux personnes handicapées la possibilité d'utiliser tous les services collectifs publics et privés.

Article 41

  1. L'alphabétisation est un impératif pour les États et chacun a droit à l'éducation;
  2. Les États parties garantissent à leurs citoyens la gratuité de l'enseignement au moins aux niveaux primaire et fondamental. L'enseignement primaire sous toutes ses formes et à toutes les étapes est obligatoire et accessible à tous sansdiscrimination;
  3. Les États parties prennent dans tous les domaines les mesures appropriées pour assurer le partenariat entre l'homme et la femme en vue d'atteindre les objectifs du développement;
  4. Les États parties garantissent un enseignement visant l'épanouissement total de l'être humain et le renforcement du respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales;
  5. Les États parties œuvrent pour inscrire les principes relatifs aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales aux programmes et aux activités éducatifs, aux programmes pédagogiques et de formation tant officiels que non officiels;
  6. Les États parties garantissent la mise en place des mécanismes requis pour assurer l'éducation permanente à tout citoyen et établissent des plans nationaux pour l'éducation des adultes.

Article 42

  1. Toute personne a le droit de participer à la vie culturelle et de bénéficier des fruits du progrès scientifique et de ses applications;
  2. Les États parties s'engagent à respecter la liberté de la recherche scientifique et de la créativité et garantissent la protection des intérêts moraux et matériels liés à la production scientifique, littéraire ou artistique;
  3. Les États parties s'efforcent d'agir en commun et de renforcer la coopération entre eux à tous les niveaux avec la pleine participation des intellectuels et des inventeurs et de leurs organisations, en vue d'élaborer et d'appliquer des programmes récréatifs, culturels, artistiques et scientifiques.

Article 43

Aucune disposition de la présente Charte ne sera interprétée de façon à porter atteinte aux droits et aux libertés protégés par les lois internes des États parties ou énoncés dans les instruments internationaux et régionaux relatifs aux droits de l'homme que les États parties ont adoptés ou ratifiés, y compris les droits de la femme, de l'enfant et des personnes appartenant à des minorités.

Article 44

Les États partiess'engagent, au cas où leurs dispositions législatives ou autres en vigueur ne garantissent pas de manière effective la mise en œuvre des droits énoncés dans la présente Charte, à prendre, conformément à leurs procédures constitutionnelles et aux dispositions de la présente Charte, les mesures législatives ou autres nécessaires à cet effet.

Article 45

  1. Il est institué, en vertu de la présente Charte, un Comité arabe des droits de l'homme ci-après dénommé "le Comité". Le Comité est composé de sept membres élus au scrutin secret par les États parties à la présente Charte;
  2. Le Comité est formé de ressortissants d'États parties à la présente Charte qui doivent être des personnalités ayant une grande expérience et compétence dans le domaine d'activité du Comité. Les membres du Comité exercent leurs fonctions à titre personnel et en toute indépendance et impartialité;
  3. Le Comité ne peut comprendre parmi ses membres plus d'un ressortissant d'un État partie; un tel membre n'est rééligible qu'une seule fois. Il est en outre tenu compte du principe de l'alternance;
  4. Les membres du Comité sont élus pour un mandat de quatre ans, étant entendu que le mandat de trois des membres élus à la première élection, qui seront désignés par tirage au sort, prendra fin au bout de deux ans;
  5. Six mois avant la date de l'élection, le Secrétaire général de la Ligue des États arabes invite les États parties à désigner leurs candidats dans un délai de trois mois; il leur communique la liste des candidats deux mois avant la date de l'élection. Sont élus membres du Comité les candidats qui obtiennent le plus grand nombre de voix. Au cas où les candidats qui ont obtenu le plus grand nombre de voix dépassent le nombre requis du fait de l'obtention d'un nombre égal de voix par deux candidats ou plus, il est procédé à un nouveau tour de scrutin entre les candidats ayant obtenu le même nombre de voix. S'il y a de nouveau égalité, le ou les membres à élire sont tirés au sort. La premièreélection des membres du Comité a lieu au plus tôt six mois après l'entrée en vigueur de la Charte;
  6. Le Secrétaire général invite les États parties à une réunion consacrée à l'élection des membres du Comité qui a lieu au Siège de la Ligue des États arabes. Le quorum est constitué par la majorité des États parties. S'il n'est pas atteint, le Secrétaire général convoque une nouvelle réunion à laquelle doit participer au moins le tiers des États parties. Si le quorum n'est toujours pas atteint, le Secrétaire général convoque une troisième réunion, qui se tiendra quel que soit le nombre des États parties présents;
  7. La première réunion du Comité est convoquée par le Secrétaire général. Au cours de cette réunion, le Comité élit son Président parmi ses membres, pour un mandat de deux ans renouvelable une seule fois pour une période identique. Le Comité établit son statut et son règlement intérieur et fixe la périodicité de ses réunions. Le Comité tient ses réunions au Siège de la Ligue des États arabes. Il peut aussi se réunir dans tout autre État partie à la présente Charte sur invitation de celui-ci.

Article 46

  1. Si, de l'avis unanime des autres membres, un membre du Comité a cessé de remplir ses fonctions pour toute cause autre qu'une absence de caractère temporaire, le Président du Comité en informe le Secrétaire général de la Ligue des États arabes qui déclare alors vacant le siège qu'occupait ledit membre;
  2. En cas de décès ou de démission d'un membre du Comité, le Président en informe immédiatement le Secrétaire général de la Ligue des États arabes, qui déclare le siège vacant à compter de la date du décès ou de celle à laquelle la démission prend effet;
  3. Lorsqu'une vacance est déclarée conformément aux paragraphes a) et b) ci-dessus, et que le mandat du membre à remplacer n'expire pas dans les six mois qui suivent la date à laquelle la vacance est déclarée, le Secrétaire général de la Ligue des États arabes en avise les États parties à laprésente Charte qui peuvent, dans un délai de deux mois, désigner des candidats conformément aux dispositions de l'article 45 en vue de pourvoir le siège vacant;
  4. Le Secrétaire général de la Ligue des États arabes dresse la liste alphabétique de tous les candidats ainsi présentés et la communique aux États parties à la présente Charte. L'élection pour pourvoir le siège vacant a ensuite lieu conformément aux dispositions pertinentes;
  5. Tout membre du Comité élu à un siège déclaré vacant conformément aux paragraphes a) et b) siège au Comité jusqu'à la fin de la partie restante du mandat du membre dont le siège est devenu vacant, conformément aux dispositions desdits paragraphes;
  6. Le Secrétaire général alloue sur le budget de la Ligue des États arabes les ressources financières et humaines et les moyens matériels dont le Comité a besoin pour s'acquitter efficacement de ses fonctions. Les membres du Comité sont considérés, en ce qui concerne la rémunération et le remboursement des frais, comme des experts du Secrétariat.

Article 47

Les États parties s'engagent à assurer aux membres du Comité les immunités nécessaires pour les protéger contre toute forme d'entrave, de pression morale ou matérielle ou de poursuites judiciaires du fait des positions qu'ils prennent ou des déclarations qu'ils font dans l'exercice de leurs fonctions en tant que membres du Comité.

Article 48

  1. Les États parties s'engagent à présenter au Secrétaire général de la Ligue des États arabes des rapports sur les mesures qu'ils auront prises pour donner effet aux droits et aux libertés reconnus dans la présente Charte et sur les progrès réalisés dans l'exercice de ces droits. Le Secrétaire général transmet ces rapports au Comité pour qu'il les examine;
  2. Les États parties présentent un rapport initial au Comité dans un délai d'un an à compter de la date de l'entrée en vigueur de la Charte pour chacun d'eux et un rapport périodique tous les trois ans. Le Comitépeut demander aux États parties des renseignements supplémentaires ayant trait à l'application de la Charte;
  3. Le Comité étudie en séance publique les rapports présentés par les États parties conformément au paragraphe b) du présent article, en présence et avec la participation au débat du représentant de l'État concerné;
  4. Le Comité examine le rapport, fait des observations et formule les recommandations requises conformément aux objectifs de la Charte;
  5. Le Comité présente un rapport annuel contenant ses observations et ses recommandations au Conseil de la Ligue par l'intermédiaire du Secrétaire général;
  6. Les rapports, les observations finales et les recommandations du Comité sont des documents publics auxquels le Comité assure une large diffusion.

Article 49

  1. Le Secrétaire général de la Ligue des États arabes soumet la présente Charte, une fois que le Conseil de la Ligue l'a approuvée, aux États membres pour signature, ratification ou adhésion;
  2. La présente Charte prend effet deux mois après la date du dépôt du septième instrument de ratification auprès du Secrétariat de la Ligue des États arabes;
  3. Après son entrée en vigueur, la présente Charte prendra effet pour chaque État deux mois après qu'il aura déposé son document de ratification ou d'adhésion auprès du Secrétariat; d) Le Secrétaire général informe les États parties du dépôt de chaque instrument de ratification ou d'adhésion.

Article 50

Tout État partie peut, par l'intermédiaire du Secrétaire général, présenter par écrit des propositions pour modifier la présente Charte. Après notification de ces propositions aux autres États parties, le Secrétaire général invite ces derniers à les examiner en vue de leur approbation avant qu'elles ne soient présentées au Conseil de la Ligue pour adoption.

Article 51

Les modifications prennent effet à l'égard des États parties qui les ont approuvées une fois qu'elles ont été approuvées parles deux tiers des États parties à la Charte.

Article 52

Tout État partie peut proposer des protocoles facultatifs additionnels à la présente Charte, et ceux-ci sont adoptés selon les modalités suivies pour l'adoption des modifications apportées à la Charte.

Article 53

  1. Tout État partie peut, en signant la présente Charte, en déposant les instruments de ratification y relatifs ou en y adhérant, émettre une réserve sur un des articles à condition que cette réserve ne soit pas incompatible avec l'objet de la Charte;
  2. Tout État partie qui a émis une réserve en application du paragraphe a) du présent article peut à tout moment retirer cette réserve en adressant une notification au Secrétaire général de la Ligue des États arabes;
  3. Le Secrétaire général notifie aux États parties les réserves émises et les demandes de retrait.

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